Aquariums, filtres, écumeurs, dénitrateurs... quel équipement pour l'élevage de vos larves et alevins ?


Les bacs             La filtration            L'éclairage            L'écumage            La dénitratation


Les Bacs

           Les volumes que nous allons vous proposer vont faire bondir la majorité des aquariophiles marins..., nous vous rappelons que notre propos est la reproduction et que les petits volumes ont le grand avantage de faciliter le recueil non traumatique des larves et alevins ainsi que celui de permettre pour un coût supportable de maintenir une qualité d'eau adéquate.

           En ce qui concerne les matériaux, rien de bien original, bacs en verre collé pour les capacités de plus de 50 litres, en deçà, les cuves thermoformées en plexiglass seront utilisées.

           Le bac de maintenance des géniteurs aura un volume qui dépendra du type d'espèce que l'on désire reproduire. La maintenance d'un couple de petites crevettes ou de bernard-l'ermite pourra se faire sans problème dans un volume de 30 à 50 litres, alors que si l'on espère faire pondre un couple de balistes, un volume de 450 litres semble un minimum. Pour les espèces les plus faciles pour débuter, comme les Amphiprions, 80 à 150 litres semblent un volume raisonnable compte tenu du fait que le couple géniteur sera maintenu de préférence seul et avec une anémone symbiotique dont ils ne s'éloignent de toutes façons jamais à plus de quelques dizaines de centimètres.

Les bacs d'élevage des larves et alevins ont un volume de 10 à 50 litres et se composent:

           A- Du bac principal, équipé d'un filtre aérobie et éventuellement d'un écumeur, d'un combiné de chauffage thermostatique classique et d'une aération puissante.
           B- De petits bacs de volume d'un litre environ, disposés au sein du bac principal, fenêtrés par une toile technique de maillage variable en fonction de la taille du plancton de nourrissage à retenir. Un circuit d'eau permanent alimente ces bacs secondaires et une aération individuelle leur est allouée, avec une puissance variable selon le type de larve à élever.







La Filtration

           Ici encore le choix du type de filtration dépendra du volume du bac. Tous les systèmes de filtration consistant à faire circuler l'eau sur un substrat bactérien aérobie permettant une dénitrification efficace sont utilisables, de toutes façons ils aboutissent tous à la transformation des nitrites (NO2), très toxiques, en nitrates (NO3), non toxiques de façon aiguë sur les poissons et crustacés (nous ne traitons pas ici des coraux) et dont le taux sera seulement à maintenir en dessous de seuils qui sont en réalité bien au delà de ce qu'il est courant de lire dans la littérature, dont la tendance "nitratophobe" actuelle, bien que louable, nous parait fort excessive au regard de notre expérience en aquariologie.
           En pratique, le seuil à ne pas dépasser pour obtenir un bon taux de survie larvaire se situe aux alentours de 30 mg/litres.



           Le principe de base est d'extraire le plus tôt possible, avant toute transformation chimique, le maximum de substances organiques susceptibles de rentrer dans le cycle de l'azote,à savoir: résidus alimentaires non consommés, organismes (animaux et végétaux) morts, déjections animales, algues qui pour se développer consomment de l'azote organique sous forme de NO3 et dont la récolte (algues supérieures et nettoyage régulier des parois du bac) participe à l'élimination de cet azote.
           Une méthode de récupération efficace des éléments en suspension dans l'eau consiste en un brassage puissant associé à la préfiltration sur perlon et surtout à l'utilisation de cloches contenant du perlon en entrée des pompes de brassage. Ce principe de "prélèvement à la source" n'a bien entendu d'intérêt qu' à la condition que l'aquariophile assidu que vous êtes, se prête au nettoyage quotidien de la ouate de perlon, afin d'extraire du bac les éléments collectés avant leur entrés dans le cycle de dégradation de l'azote.
           Ceci n'a pas vocation à se substituer à la filtration aérobie, mais à la soulager en diminuant la masse de matière à transformer, permettant ainsi de réduire d'autant la production de Nitrates.

           L'écumage, dont nous parlerons un peu plus loin a également pour effet d'éliminer des lipoprotéïnes dissoutes avant leur entrée dans le cycle de l'azote.




L'Eclairage



           Trois solutions sont à retenir pour le bac de maintenance des géniteurs:

                      -Soit un éclairage halogène HQI 10.000 K, voire 15.000 ou même 20000 K

               -Soit une combinaison de 2 tubes néon, 1 néon 10.000 K (type "AQUASTAR") + 1 néon bleu (type "MARINE GLO").

              -Soit, et c'est actuellement celle que nous recommandons, une solution moderne et économique: l'éclairage à LEDS, en combinant des LEDS blanches 12.000 K et des LEDS bleues. Les gros avantages de cette méthode sont sa faible consommation (environ 50% en deçà des autres solutions pour un rendu encore plus naturel) et l'absence de diffusion de chaleur.

           Il est indispensable de s'en tenir à ce type de lumière, seule capable d'assurer l'apport en énergie lumineuse nécessaire à la survie des anémones commensales des Amphiprions. Les autres types de lampes favorisent en outre la croissance d'algues indésirables et leur effet esthétique est très médiocre.

           En ce qui concerne les bacs d'Alevinage, on évitera une lumière trop intense et les sources lumineuses latérales. On utilisera un tube fluorescent 10.000 K situé au minimum à 50 cm au dessus de la surface et on occultera les faces latérales du bac.


           Afin d'allèger le budget de l'installation, il est tout à fait possible d'utiliser les rampes néon 36 W que l'on trouve régulièrement en promotion dans les grandes surfaces de bricolage pour moins de 8 euros, à condition bien entendu de remplacer le néon fourni d'origine par un tube de type adéquat.


L'Ecumage

           Voici un matériel essentiel au maintien de la bonne qualité de l'eau de vos bacs. L'écumeur permet d'extraire de l'eau du bac les molécules dissoutes ayant un pôle hydrophile et un pôle hydrophobe, à savoir: les protéines, les composés phénolés (peu toxiques mais donnant une triste coloration jaunâtre à l'eau des bacs trop vieillis) et les lipides. Le principe est de créer une forte zone de turbulences au sein d'un espace confiné (réacteur de l'écumeur) où vont se mèler intimement l'eau venant du bac avec des bulles d'air que l'on s'évertuera à rendre les plus fines possibles, afin d'augmenter la surface et le temps de contact air/eau. Il s'ensuivra la formation d'écume à la surface qui poussée vers le haut par le flux d'air va remonter dans un tube de diamètre inférieur au réacteur pour enfin être recueillie par débordement.

           Il existe de nombreux modèles d'écumeurs et les aquariophiles bricoleurs débordent d'imagination pour réaliser des appareils surpuissants comme en témoignent les nombreux posts traitant de ce sujet sur les forums spécialisés. Sans rentrer dans une querelle partisane qui déchaine en général les passions, la tendance actuelle est aux écumeurs à dispergation dans lesquels le mélange eau/air se fait par effet venturi en amont du rotor, lui même souvent modifié pour optimiser le "broyage" des bulles d'air.

           Le principal problème des écumeurs réside en fait dans leur prix élevé, nous semblant totalement injustifié eu égard à la simplicité technologique de l'appareil. A ce titre, nous vous proposons la réalisation d'un petit écumeur fabriqué avec des éléments peu onéreux et dont le rendement parfaitement honorable est largement suffisant pour un bac de 300 litres. Pour des volumes supérieurs, il suffit d'en utiliser plusieurs en parallèles ou d'adapter la technique en augmentant la taille du réacteur et la puissance de la pompe. Les sceptiques peuvent tenter l'expérience à moindre frais: environ 50 € (pompe comprise) et 2 heures de bricolage...

           Nous utilisons ces écumeurs "maison" sur nos batteries de maintien des géniteurs, qui, couplés à l'utilisation de pierres vivantes (sur lesquelles nous reviendrons plus loin) nous assurent une eau cristalline et un taux de nitrates inférieur à 20 mg/l. Taux qui soit dit en passant permet sans aucune difficulté l'élevage jusqu'à maturité des alevins d'Amphiprion et des larves de Pagures et de Lysmata.





La Dénitratation

           Comme nous l'avons vu plus haut quel que soit le type de filtration aérobie choisie, celle-ci se aboutit à la formation de Nitrates (NO3) impasse finale du cycle aérobie de l'azote. Bien que peu toxiques sur les poissons, le maintien d'invertébrés, à fortiori de leurs larves, et d'alevins necessite de maintenir le taux de Nitrates au plus bas.
           Toutes les méthodes de dénitratation ont pour point commun l'utilisation de la capacité des bactéries anaérobies (vivant en milieu non oxygéné) à dégrader les Nitrates (NO3) afin de récupérer les atomes d'oxygène (O) pour leur "respiration" et aboutir au rejet de l'azote sous forme gazeuse (N2). La source d'énergie utilisée sera soit d'origine carbonée (DSB , dénitrateurs hétérotrophes et pierres vivantes), soit d'origine soufrée (DAS).

Les DSB et le système "Jaubert"



           Ces deux méthodes sont à peu de choses près équivalentes, elles consistent en une couche de sable d'environ 10 à 13 cm de granulomètrie la plus fine possible: le lit de sable épais ou Deep Sand Bed. Ce sable va voir sa couche superficielle, aérobie (par simple diffusion de l'O2 contenu dans l'eau), colonisée par des bactéries aérobies qui vont assurer la dégradation des déchets azotés jusqu'au stade des nitrates (NO3). Ces nitrates vont ensuite diffuser dans les couches profondes du lit de sable, colonisé lui par des bactéries anaérobies qui vont se charger de dégrader les Nitrates en azote gazeux (N2). Le système Jaubert, possède par rapport au DSB, une couche d'eau confinée de 1 à 2 cm d'épaisseur, sous le lit de sable. L'utilité réelle de cette couche d'eau censée réguler les gradients de Nitrates ne nous a jamais semblé très claire...

                      Les deux principaux problèmes de ces méthodes sont:

      1- L'ensemencement des couches profondes en bactéries anaérobies.
           Personnellement nous optons pour l'enfouissement parsemé de petits morceaux de moules au démarrage du DSB. Cette méthode, pour empirique qu'elle soit, donne de bons résultats.

      2- Le colmatage de la surface du lit de sable, empèchant la diffusion de l'O2 dans les couches superficielles et par là même rendant le système inefficace voire toxique par production d'hydrogène sulfuré. On remédie à ce problème grâce à la microfaune qui va en permanence "labourer" la couche toute superficielle du DSB. ATTENTION, par couche toute superficielle nous entendons quelques millimètres, les poissons fouisseurs tels les gobies ou tout autre animal remuant le sable en profondeur sont à proscrire, car les bactéries anaérobies des couches profondes ne supportent pas l'aérobiose et meurent. La faune utilisable sera constituée de gamares, mysis, petits bernards l'ermite type Clibanarius tricolor, et de vers polychètes (visibles sur la photo ci-dessus). On a pu lire qu'il fallait une microfaune particulière, non disponible en France que seuls certains initiés avaient pu se procurer aux états-unis.... ceci relève bien entendu de la plus pure désinformation, nos DSB fonctionnent à merveille depuis plusieurs années sans la mystérieuse microfaune...



Les Dénitrateurs Autotrophes sur Soufre (DAS):

           Cette méthode, toujours basée sur la réduction de la molécule de NO3 par une bactérie anaérobie, utilise la capacité de Thiobacillus denitrificans à utiliser le soufre comme source d'énergie en milieu peu oxygèné. La technique, qui a fait ses preuves, nécessite une phase de règlage assez pointilleuse et est susceptible en cas de dérèglement des débits de produire des nitrites. La mise en route est très rapide, 48 heures environ. La réaction peut être résumée ainsi:

4 NO3 + 3S ====> 2 N2 + 3 SO4

           L'eau en sortie, chargée en sulfates, trop acide pour être rejetée directement dans le bac, devra traverser une couche de Maerl afin d'être tamponnée, ce qui peut, en fait, être utilisé de façon avantageuse dans la mesure ou ceci se substituera parfaitement à un réacteur à calcium. Enfin, bien que l'eau de mer naturelle contienne plus de 2,5 g de sulfates par litre, cette méthode en produit dose pour dose par rapport aux nitrates éliminés. Bien qu'à priori non toxiques, les effets d'une accumulation importante de sulfates semblent actuellement à notre connaissance assez mal évalués.

Les Dénitrateurs Hétérotrophes

           Le principe est globalement le même que celui des DAS, à ceci près qu'ici la source d'énergie utilisée par les bactéries proviendra du carbone et non du soufre. Il faudra donc apporter régulièrement aux bactéries du carbonne sous forme de Glucose ou de Méthanol. Pour que le système fonctionne ces apports doivent être finement règlés, ainsi que le débit d'eau car les bactéries utilisées ici sont anaérobies strictes et meurent en cas d'apport d'O2 ce qui en pratique rend assez aléatoire la méthode. Ce système n'est quasiment plus utilisé en raison de sa complexité par rapport aux DSB et aux DAS. La mise en route est par ailleurs lente, un mois minimum.

Les Pierres Vivantes

           C'est certainement la méthode la plus appréciée actuellement, et ce à juste titre car parfaitement naturelle et particulièrement esthétique.
           La technique, ici est identique à ce qui se passe dans les DSB, à savoir une dénitrification en aérobiose dans les couches superficielles de la pierre puis une dénitratation dans les couches profondes, anaérobies. Les pierres vivantes ont le gros avantage de permettre la réalisation de décors très réalistes et esthétiques. Le principal inconvénient de la méthode est d'introduire d'éventuels prédateurs tels que crevettes mantes, vers divers pouvant atteindre une taille impressionnante, crabes et les indésirables aiptasias qui envahissent très rapidement tout le décor. Ces hôtes indésirables, souvent introduits sous forme juvénile voire larvaire ne se feront parfois remarquer qu'au bout de plusieurs mois, une vigilance prolongée s'impose.
           Les pierres de bonne qualité se repèrent à leur faible densité, témoin de leur micro-porosité, indispensable à la colonisation bactérienne et à la bonne diffusion des nitrates en profondeur. La colonisation superficielle par des algues coralines, des algues supérieures et divers invertébrés, bien que souhaitable, n'est en aucun cas témoin de la qualité de la pierre, fiez vous uniquement à son poids, plus elle sera légère, meilleure elle sera.
           Un dernier point essentiel sera d'assurer une bonne circulation d'eau autour des pierres par un brassage efficace, idéalement alternatif pour minimiser la sédimentation. Ici encore de houleux débats animent les forums spécialisés mais on peut raisonnablement considérer que 15 kg de pierres pour 100 litres d'eau sont une quantité raisonnable pour assurer le bon équilibre du bac. Cette valeur moyenne est bien entendu à adapter au peuplement de l'aquarium.